Loisirs et pratiques culturelles des jeunes divertissements

Les loisirs et pratiques culturelles des jeunes paraissent homogènes. Mais à y regarder de plus près, les inégalités d’accès, notamment à la culture.

Qui sont les jeunes ?
Cet article fait partie d’un dossier, réalisé par l’Observatoire des inégalités en partenariat avec Jeunesses en régions, qui dresse le portrait des 15-30 ans, aux premières loges de la crise de l’emploi et du mal logement.

D’abord technologique, la révolution numérique a bouleversé les usages et modes de consommation culturels, particulièrement auprès des jeunes générations, nées dans un univers où l’accès à l’information, au savoir et à la culture est numérique. Baptisées, dans le monde anglo-saxon, les digital natives, ces jeunes générations présentent un visage assez différent de leurs aînées dans leur rapport au champ culturel. D’une part, elles ont bénéficié de la généralisation de l’accès à la culture, notamment par l’intermédiaire de l’institution scolaire, ainsi que de la généralisation des équipements multimédias et technologiques. D’autre part, les technologies tendent à modifier la place attribuée pratiquement et symboliquement aux pratiques culturelles traditionnelles (lecture, fréquentation des équipements culturels) et font ainsi évoluer le périmètre du champ culturel, dans le sens d’une plus grande porosité. Les mutations des modes de consommation – consommation à la demande, convergence des usages sur un même support qui facilite un temps multitâche, développement de l’éclectisme, de la curiosité et de la consommation culturelles – engendrent dans les jeunes générations une redéfinition de la labellisation au détriment de l’institution et au profit de l’individu et des réseaux. Les instances de transmission culturelle que sont l’école et les équipements culturels sont donc confrontées à des bouleversements affectant les fondements de leur action : conception du temps, des objets culturels, du lien entre savoir et culture et de ses médiateurs. Elles sont appelées à revisiter leur modèle de médiation pour l’adapter aux jeunes générations, afin de favoriser l’émergence d’une culture de demain et pour permettre la transmission d’un patrimoine culturel, lui-même en voie de redéfinition.

Certains travaillent ou cherchent un emploi, d’autres étudient. Mais pour la plupart, la jeunesse reste et restera le temps des sorties, des soirées, du cinéma aux boites de nuit en passant par les clubs de sport. Les moins de 30 ans ont des pratiques culturelles et de loisirs plus intenses que le reste de la population. Premier loisir propre à cette génération : le temps passé avec les copains. Pour 85 % d’entre eux, c’est une activité centrale.

Favoriser l’accès des jeunes à des loisirs éducatifs de qualité

La mise en place des projets éducatifs territoriaux impulsée par l’État dans le cadre de la réforme des rythmes éducatifs doit conduire à proposer une offre globale incluant la prise en compte du public adolescent et jeune. À ce titre, ont vocation à s’y inscrire des activités de loisirs culturels et sportifs diversifiées proposées par les associations, notamment de jeunesse et d’éducation populaire, grâce à des équipes d’encadrement qualifiées.

L’offre de loisirs éducatifs proposée sur les territoires prend souvent très bien en compte les besoins des enfants par l’organisation des activités périscolaires et extrascolaires. La prise en compte des attentes et des besoins des adolescents est en revanche aujourd’hui encore insuffisante, car plus difficile à appréhender et invitant à des
organisations innovantes, associant les jeunes aux projets.

La valorisation de l’engagement des jeunes animateurs dans l’animation volontaire participe également de cet objectif par les responsabilités d’encadrement qui leurs sont confiées.

Renforcer l’accès de tous les jeunes à l’art et à la culture

Le projet national pour l’éducation artistique et culturel (EAC) porté par le ministère de la Culture et de la Communication permettra de développer et de généraliser l’éducation artistique et culturelle pour tous les jeunes, de la petite enfance à l’université sur l’ensemble de leurs temps de vie, dans l’école et hors de l’école.

Tous les enfants et les jeunes sont concernés, notamment les jeunes habitant les zones déficitaires (zone urbaines sensibles, zones rurales, régions d’outre-mer), les jeunes en situation d’exclusion sociale, scolaire
et professionnelle, les familles bénéficiant des minimas sociaux et les jeunes en situation de handicap, hospitalisés ou sous protection judiciaire. Les capacités et les aptitudes développées à l’occasion de l’engagement dans les activités associatives et culturelles seront valorisées (livret ou portefeuille de compétences).

Un partenariat étroit avec les collectivités territoriales permettra de proposer aux jeunes une offre diversifiée, sous forme de parcours d’éducation artistique et culturelle, en adéquation avec leurs besoins et les ressources identifiées sur leur territoire de vie.

La participation des jeunes dans les comités d’usagers, dans les instances de gouvernance des institutions culturelles sera recherchée.

Développer une offre audiovisuelle et numérique de service public en direction des jeunes

Il existe une offre radiophonique et numérique publique en direction des publics jeunes, principalement orientée vers l’acquisition des savoirs.

Ainsi, la plateforme « France tv éducation » destinée aux élèves et à leurs parents met l’accent sur l’éducation aux médias numériques et sur le décryptage de l’information. Le Webmédia étudiant de France Culture, conçu à l’issue d’une réflexion avec les universités, les grandes écoles et le réseau national des radios campus, propose des contenus exclusifs, au plus près des attentes des étudiants à travers une sélection des productions multimédias provenant des Universités et des Grandes Écoles : cours, conférences, rencontres, podcasts d’émissions de France Culture, sélectionnés dans tous les domaines.
Le réseau de service public Le Mouv’ offre, depuis sa création, une alternative aux réseaux de radio commerciaux pour le public jeune.

En réalité, l’observation des répertoires de loisirs des générations adultes et jeunes montre que les médias ne sont en rien des loisirs populaires – typique des classes populaires – puisqu’ils sont largement partagés et constituent désormais un socle de loisirs commun. Des distinctions s’opèrent néanmoins selon les types de contenus consommés (les chaînes par exemple) et les temps de consommation (les classes populaires ayant tendance à regarder la télévision plus longtemps que les catégories supérieures par exemple) et ensuite, de manière très fine, par produit médiatique. Il est ainsi faux de dire que les séries télévisuelles sont un produit populaire puisque certaines trouvent leurs fans chez les cadres (Desperate Housewives24 heures chrono, etc.).

S’inscrire à un club d’équitation ou s’offrir un mois de congé au bord de la mer n’est pas donné à tous les jeunes. Mais les inégalités d’accès aux loisirs entre jeunes de catégories sociales différentes résident autant dans des éléments matériels (niveau de vie, proximité géographique, etc.) que symboliques tels le diplôme, la maîtrise de la langue et de l’écrit ou le milieu familial. 17 % de ceux qui n’ont pas de diplôme ou au mieux le certificat d’étude sont allés au théâtre ou au concert au moins une fois dans l’année, contre 57 % de ceux qui ont un diplôme supérieur au bac (données 2000). Enfin, face aux loisirs, les rôles filles-garçons demeurent assez distincts. Pour occuper leur temps libre, les jeunes filles se tournent davantage que les garçons vers la communication entre ami(e)s (discussions, SMS, messageries instantanées…), le shopping en centre-ville ou dans les centres commerciaux, les jeunes garçons vers les jeux vidéo.

Une partie de ces loisirs concerne l’ensemble des jeunes sans que le sexe ou l’origine sociale ait une grande influence. Les pratiques culturelles (livres, cinéma, musées, théâtre, etc.) se sont diffusées au cours des trente dernières années, notamment parce que l’élévation du niveau de diplôme se conjugue avec la croissance de l’offre (bibliothèques, patrimoine culturel, expositions notamment). Cependant à y regarder de plus près, les inégalités d’accès demeurent bel et bien présentes chez les jeunes, comme elles influencent le reste de la population en matière de pratiques culturelles.

De très nombreux facteurs se conjuguent pour expliquer les pratiques culturelles. Parmi eux, le milieu social est central. Parce qu’il faut mettre la main au portefeuille le plus souvent, mais aussi du fait de l’influence des personnes avec qui l’on vit, de ses origines familiales ou de son diplôme. Ceux qui ont eu l’habitude de visiter des musées dans leur enfance sont beaucoup plus familiers de ces lieux souvent intimidants. Même chose pour ceux qui ont eu accès aux clés de compréhension de l’art (l’histoire du créateur, de son œuvre, le contexte historique, etc.) au cours de leurs études. Encore ne faut-il pas y voir une mécanique implacable : l’élévation du niveau de qualification joue dans le sens de la démocratisation des pratiques.

Plus précisément, il nous a semblé essentiel, dans un premier temps, de poser une série de
questions relatives à différents types de pratiques culturelles, afin d’avoir accès à un
« panorama » des activités pratiquées par les jeunes.

Nous avons, dans un second temps, fait le choix de privilégier l’étude plus
approfondie de leurs pratiques dans trois domaines : la musique, la lecture et les jeux.
Il s’agissait de questionner ces activités à la fois sur leurs versants numérique et non
numérique, à savoir pour la musique, la fréquentation de concerts mais aussi l’écoute
de la musique, la lecture « papier » ou la lecture sur support numérique ou en ligne
ainsi que la fréquentation de la bibliothèque et enfin, la pratique des jeux de société mais
également des jeux vidéo.

Soulignons par ailleurs que le fait d’assister à des spectacles de façon plus régulière (plus
de deux fois par an) concerne 18,2% des enfants de fin de primaire, alors que cela
concerne seulement 7% des jeunes de secondaire.


La fréquentation des spectacles est suivie de très près par la fréquentation des musées et
expositions. En effet, près de la moitié des jeunes fréquente des musées ou visite des
expositions en dehors de l’école.

Quel est actuellement le poids des influences familiales sur les pratiques réelles des enfants et des adolescents ? Peut-on toujours définir une culture « légitime » qui correspondrait à celle des classes favorisées et dont les classes populaires seraient exclues ? Quel est le rôle des médias et de l’industrie culturelle dans l’envie de pratiquer telle ou telle activité culturelle ?
À travers ces questions, ce Dossier de veille de l’IFÉ aborde bien entendu des problématiques éducatives : l’école joue un rôle majeur d’ouverture et d’apprentissage culturels (en vue de l’acquisition d’un patrimoine culturel commun), et elle est en même temps le lieu principal de rencontres entre les enfants et les adolescents, porteurs chacun de marqueurs culturels familiaux, amicaux, territoriaux, etc. Ce dossier met en lumière les différentes manières dont les enfants et les adolescents se forgent leur propre personnalité et prennent leur autonomie face à ces nombreuses influences, mais également les manières dont ils se conforment ou au contraire résistent aux pratiques culturelles de leurs pairs, à la pression scolaire qui les incite à choisir leur orientation et aux restrictions familiales qui limitent parfois leur désir d’autonomie.


Avec l’élargissement des pratiques culturelles et la modification des frontières entre consommateurs et producteurs dus au développement du numérique, de nouvelles réflexions émergent, sur la notion même de public qui est au cœur des dispositifs d’offre des équipements culturels, et sur les théories de la hiérarchisation et de la domination culturelles construites par Bourdieu.

Les travaux de recherche spécifiques sur les pratiques culturelles des enfants et des adolescents sont relativement récents, puisqu’ils sont liés au développement du courant de la sociologie de l’enfance et que les enquêtes nationales mises en place par le ministère de la Culture depuis les années 1960 ne s’adressaient qu’aux plus de 15 ans. Pour appréhender l’ensemble des activités culturelles et de loisirs des enfants et des adolescents en dehors du temps scolaire, comme par exemple le temps qu’ils passent à jouer, à écouter de la musique, à communiquer avec leurs pairs, etc., les sociologues utilisent ainsi plusieurs sources : ils croisent les données des enquêtes nationales et celles de recherches plus détaillées et qualitatives sur de plus petits échantillons.

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